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DANGERS / OPPORTUNITES CONCERNANT LA REFORME DU DROIT DES CONTRATS

Préambule

Avec le quelque recul donné après lecture de l’ordonnance et d’articles il nous semble que le qualificatif principal de cette réforme est égalité.

On constate à première lecture que le législateur consacre des jurisprudences établies venant juridiquement rectifier des rédactions de contrat entrainant de réels déséquilibres.

Il suffit d’avoir en tête la jurisprudence « Chronopost ».

Une lecture plus attentive de l’ordonnance nous amène à constater que systématiquement il est recherché une égalité contractuelle.

Fallait-il mettre dans le marbre de la Loi cette notion d’égalité venant ainsi contrebalancer la liberté contractuelle ? L’avenir ne tardera pas à nous le dire surtout que se développe rapidement des stratégies juridiques et du « forum shopping », cet anglicisme est à lui seul révélateur !

Le juge français sera amené à fixer le contour de l’application de ce texte. Quel va être sa ligne ?

Exercer un contrôle fort sur les dispositions supplétives pour porter le principe d’égalité, ou s’en tenir à un contrôle à minima laissant aux parties leur liberté contractuelle ?

Demain s’annonce intéressant mais pour revenir à des sujets pratiques, il nous faut nous préparer à ce nouvel environnement juridique.

Les dispositions de l’ordonnance de 16 février 2016 amènent à l’analyse suivante : l’ingénierie juridique des risques devient incontournable dans les relations en sociétés.

I. Définir un processus de négociations avec ses partenaires commerciaux afin d’éviter de subir des obligations mal maîtrisées

Cet aspect a souvent été maltraité voir ignoré des entreprises qui s’estimaient suffisamment à l‘abri par le seul fait d’avoir rédigé un contrat type.

Encore faut-il qu’il soit applicable…devant le juge.

Avec les nouvelles dispositions encadrant formellement les négociations contractuelles encore plus qu’hier, on ne peut se passer de définir le périmètre juridique et son corollaire : la ou les procédures à suivre.

L’ordonnance accorde un chapitre à la formation du contrat.

Elle oblige par une disposition d’ordre public au principe de loyauté dans les informations (Art 1112-1) et rappelle le principe d’une responsabilité délictuelle en cas de non-respect (Art 1112-2)

En tout état de cause l’indemnisation ne peut porter que sur les avantages attendus.

Il est loisible aux parties d’avoir un avant contrat ou contrat de négociation avec la possibilité d’une clause pénale ou limitative de responsabilité.

La promesse de vente (Art 1124) devra prévoir si la faculté de dédit est à titre gratuit ou onéreuse.

Le silence ne vaut pas acceptation sauf si les parties y dérogent (Art 1120).

L’éternel débat quant aux conditions applicables entre les parties reste ouvert, l’article 1119 renvoyant les parties dos à dos.

Des droits étrangers sont plus protecteurs des conditions du vendeur ce qui a pour effet de limiter aussi les indemnisations possibles et par la même le coût de la couverture d’assurance. Il va falloir rester attentif et encadrer son processus précontractuel :

  • Envoi dans les devis, des conditions générales et preuve sauvegardée de cet envoi. 
  • Envoi d’un bon de commande ou vérification que l’accord du cocontractant ne déroge pas aux conditions tant juridiques que techniques.
  • Rejet des acceptations non conformes au périmètre juridique
  • Définir les conditions de dérogation à ce processus (personnes habilitées, niveau d’acceptation des risques financiers générés, couverture d’assurance conforme …)

Il est possible entre professionnels de déroger aux conditions propres des contrats conclus par voie électronique (Art 1127-3)

Un mot des clauses de divisibilité elles resteront soumises au contrôle du juge si elles sont contraires à l’économie générale du contrat (Art 1170 et 1171)

II. Les conditions de vente ou de prestations et les clauses des contrats de ses fournisseurs

Hormis le fait que la réforme engendre une nouvelle numérotation des articles qui nécessite à elle seule de reprendre sur ce seul sujet ses conditions de vente ou de prestations, c’est aussi le corps même du contrat qu’il faut retravailler.

On citera en premier lieu dans le nouveau droit des contrats les dispositions d’ordre public :

  • L’article 1112-1 quant à la communication d’une information déterminante pour le consentement de l’autre
  • L’article 1170 qui réprime toute clause qui prive de substance l’obligation essentielle du débiteur
  • L’article 1171 qui réprime les clauses créant un déséquilibre significatif dans les contrats d’adhésion
  • L’article 1231-5 qui laisse au juge l’appréciation d’une clause pénale
  • L’article 1343-5 qui permet l’intervention du juge pour l’étalement sur 2 ans du paiement de sommes dues.   

Si l’on s’accorde à considérer que les articles n’ayant pas explicitement mention de leur caractère d’ordre public sont donc supplétifs, il n’en reste pas moins que le juge pourra en contrôler les excès au regard notamment des articles 1170 et 1171 qui en seront les fondements.

Rentrons dans le sujet des limitations de responsabilité.

On mesure bien que s’exonérer de toute responsabilité amènerait peu ou prou le juge à sanctionner une telle clause comme créant un déséquilibre significatif (1171) ou privant de substance l’obligation essentielle du débiteur (1170).

Tout sera à notre avis question de cohérence, de mesure et d’explication.

Une clause limitative de responsabilité et/ou d’indemnisation devrait être explicitement indiquée comme étant une condition essentielle et déterminante du contrat sans laquelle le vendeur ou le fournisseur d’une prestation ne s’engagerait pas à faire une offre de prix voir refuserait de contracter au regard de la trop grande importance des risques pécuniaires encourus et de la possibilité offerte pour l’autre partie de se prémunir par des assurances de dommages et pertes d’exploitations.

On étudiera dans le point III comment articuler cela avec sa couverture d’assurances.

Ainsi il faut veiller à ce que la clause limitative ne soit pas dépourvue de réciprocité, ne soit pas sans justification, ni inhabituelle.

Dans les contrats d’adhésion (Art 1171) au regard du déséquilibre significatif, on peut citer les situations :

  • créant une soumission du partenaire commercial  
  • imposant sans négociation
  • avec des prérogatives excessives unilatérales
    • mais aussi
  • toute absence de contrepartie, ou de réciprocité
  • toute obligation potestative

 

L’article 1170 permet de frapper de nullité les clauses privant l’obligation essentielle de substance. Ainsi toute clause qui contredit la portée de l’engagement de l’obligation sera nulle. Il semble que cet article permettra de faire un contrôle à l’égard de toute clause restreignant de manière arbitraire l’indemnisation, les garanties, les réclamations, les couvertures et la prescription.

Il a donc lieu de ne pas rédiger des clauses qui réduiraient le contrat à une contrepartie dérisoire.

En conclusion, il faut définir, expliquer, justifier, contextualiser et formaliser. Ainsi on peut écarter une disposition supplétive et notamment insérer des clauses limitatives de responsabilité et/ou d’indemnisation mais cela présuppose de le faire de bonne foi.

III. Les couvertures d’assurance

Il y a lieu de vérifier les contrats signés avec ces partenaires au regard des assurances souscrites :

  • cohérence et l’applicabilité des assurances de responsabilité au regard des engagements contractuels pris par l’entreprise;
  • étude de la possibilité offerte par des assurances de dommages de régler des évènements afin d’éviter des situations conflictuelles avec ses partenaires commerciaux.

Nous avons déjà fait mention des assurances dans notre exposé il revient ici de rappeler les principes qui gouvernent les assurances de responsabilité.  

Les clauses limitatives de responsabilité : Le juge français a depuis toujours exercé un contrôle sur ce type de clause. Il n’en reste pas moins qu’entre professionnels celles-ci sont recevables encore faut-il qu’elles ne dénaturent pas le contrat.

Néanmoins on constate dans les pratiques commerciales européennes mais également dans les pays de common law que ce type de clause est largement répandue.

En pratique dans notre droit une clause visant à s’exonérer de toute responsabilité recevrait la censure du juge en application des articles 1170 et 1171.

Il apparait cohérent de limiter ce type de clause à l’indemnisation des préjudices financiers qui peuvent dans certains cas devenir des réclamations hors de proportion avec l’économie du contrat entre les parties. 

Cette limitation d’indemnisation permet de souscrire des montants de couverture d’assurance au titre de la garantie des dommages immatériels consécutifs ou non qui ne rendent pas prohibitif le coût de l’assurance de responsabilité.

La référence des assurances au droit commun : les assurances de responsabilité intègrent une exclusion générale qui exonère l’assureur de toute indemnité dans les cas où son client a contracté des obligations plus lourdes que ce que prévoit le droit des contrats appelé aussi droit commun.

Il faut reconnaitre que cette clause n’est pas toujours utilisée en pratique,  mais on constate un développement de plus en plus important de son application par l’assureur.

Il faudra donc rester vigilant tant au regard des contrats clients que fournisseurs ou sous-traitant à ne pas subir ce type d’exclusion.

Il est possible également de dénoncer ses contrats de vente et d’achat à son assureur afin qu’il les accepte en l‘état, cette solution n’est pas toujours aisée et tous les assureurs ne s’y plient pas.

Enfin on peut se poser pour l’avenir la validité d’une telle exclusion qui vide de toute substance le contrat d‘assurance dans un environnement juridique où aujourd’hui la plupart des sociétés ont rédigé des conditions de vente ou de prestation en leur faveur. Mais trouver une telle réponse judiciairement lors d‘un litige client n’est pas la meilleure des formules…

Les assurances de dommages peuvent être une alternative pratique aux litiges. On peut citer les assurances ad valorem en transport qui permettent une indemnisation complète et ce sans tenir compte des limitations légales de responsabilité des transporteurs.

Il y a également les tous risques montage essais et tous risques chantiers qui permettent d’indemniser avec ou sans recours selon les formules choisies. Il est possible d’associer à ces garanties de dommages des garanties pertes d’exploitations.

IV. L’option d’utiliser également lorsque cela est possible un droit étranger ou d’imposer le droit français !

Dans les contrats avec des partenaires étrangers il faut garder à l’esprit que certains droit sont protecteurs de leurs ressortissants et que les recours à leur encontre ne seront pas faciles. Selon la culture de certains pays les clauses limitatives ne posent pas de difficulté. Les partenaires restent souvent méfiants à l’égard du droit national de leur cocontractant souvent considéré comme étant peu favorables à leurs intérêts.